domingo, 28 de junio de 2009

COMME UN ÉLÉPHANT TRISTE

Je désire faire l’amour en plein été,
comme le faisaient dans mon pays les sans-terre,
ils se réclamaient les uns les autres
et il n’y avait plus d’amour.

Faire l’amour, me dis-je, avec détermination,
préméditation même,
comme cela arrivait aux femmes de mon village,
avec leurs amours uniques.

Faire l’amour jusqu’à rompre
l’équilibre qui me permet d’aimer.
Comme les fleurs qui agonisent,
brûlées, brisées,
par ce même soleil qui leur donna la vie.

Maintenant, dans cette lente matinée d’été,
je veux que le vent produise,
ce son aigu et déchiré
de l’amour sans barrières.
Comme font l’amour les papillons
où le vers et les ailes
se rejoignent pour mourir.

Aujourd’hui je voudrais pratiquer l’amour bestial.
Comme le font les cochons et les mouettes,
et les vampires paisibles et les vaches.
Femelle et mâle, animaux en rut,
sans mots.

Et un jour j’ai dit :
aujourd’hui je veux aimer tout ce qui s’est passé.
Et ma vie s’est remplie de morts.
J’avoue avoir été comme eux,
j’en suis arrivé à jouir assis sur une chaise,
immobile, sans âme, en attendant un vers.

Et, ensuite, j’aimerais aimer,
de pays en pays, d’océan à montagne
et me laisser tomber comme les soldats
qui meurent enlacés à l’arme qui les tue.

Je dois aimer, me dis-je, je dois aimer.
Comme les jeunes aiment au printemps,
peu leur importe, ils se moquent du monde.

J’aimerais, pourquoi pas, faire l’amour
en m’étendant sur un vers,
comme les lettres,
les mots le font
et je deviens jaloux
parce que je ne peux pas tant
et je pleure comme une femme,
ce que j’ai défendu comme un homme
sans que ça serve à rien.

Aimer, aujourd’hui je me laisserais aimer.
Je serais l’homme mort-vivant,
que la femme désire.
Rester tranquille, me dis-je,
m’attacher, sans plus, à l’avenir.
Embrasser la bouche qui embrasse l’univers
et éteindre la lumière.

Aujourd’hui c’est une chaude après-midi
d’été en Europe.
Et celui qui se l’imagine
n’aurait jamais pu
l’imaginer ainsi :

Assis et en train d’écrire,
faisant l’amour dans les cloaques de ma ville.

Connaissant à fond la vie quotidienne.
« Amour et haine se ressemblent »
amour et haine se ressemblent,
criait le condamné
et il étreignait avec ardeur ses propres paroles
et aimait
tout ce qui ne pouvait être et tombait,
se laissait tomber sur son corps.

C’est ainsi que je voudrais aimer, ainsi.
L’âme brisée de solitude,
sans que personne ne me voit pleurer pour ce qui est perdu,
comme un éléphant triste qu’on ne verra pas mourir.

de MIGUEL OSCAR MENASSA
traduit de l'espagnol par Claire Deloupy

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